Rappel
18 Août 2020, un putsch militaire conduit par le colonel Assimi Goïta renverse le président de la République du Mali, Ibrahim Boubakar Keïta (IBK) :
Ce coup d’état fait suite à cinq mois de vives contestations, après que les résultats des élections législatives de la fin Mars 2020 ont été plus ou moins trafiqués. Des manifestations populaires hostiles au régime ont duré ensuite jusqu’à l’été, particulièrement à Bamako. Une vaste coalition s’est galvanisée autour de quelques leaders, comme l’imam Mahmoud Dicko, la figure la plus en vue de ce mouvement qui s’organise à partir du 5 juin, et prend le nom de M5-RFP (mouvement du 5 Juin-Rassemblement des Forces Patriotiques).
C’est donc une junte militaire qui a eu raison du régime. La communauté internationale condamne et prend des sanctions à l’encontre du Mali. Il faut un mois et demi aux militaires pour négocier avec les partenaires internationaux des instances de transition acceptables. En particulier avec les 15 pays de la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest )
Le 1er octobre, une charte de la transition est publiée. Elle prévoit notamment une durée de 18 mois maximum pour la remise du pouvoir aux civils, elle envisage la refonte de la loi fondamentale, elle met en priorité le retour au Mali de la sécurité et la nécessité de l’application de l’accord de paix d’Alger, signé en 2015.
Le 3 octobre, cérémonie d’investiture pour le président de transition Bah N’Daw, ancien colonel à la retraite. Avec le nouveau premier ministre, Moctar Ouane, ancien diplomate, ils sont les cautions civiles d’un gouvernement dont les postes clefs restent aux mains des militaires. Assimi Goïta, le jeune chef de la junte, reste vice-président.
Il faut ensuite deux mois pour constituer le Conseil Nationale de la transition, qui va se substituer à l’Assemblée nationale : les 121 membres sont élus seulement début décembre, suite à un long bras de fer entre les militaires d’un côté et la classe politique et la société civile de l’autre. C’est un colonel putschiste qui en devient le président.
La grande coalition M5-MFP, qui s’est créée et mobilisée contre IBK au printemps, peut se sentir perdante dans cette représentation nationale.
A peine 6 mois plus tard, que se passe-t-il ?
Les événements récents
En ville, la contestation politique et sociale est grandissante, les mises en œuvre espérées se font attendre, les menaces de grève pointent, le climat est tendu.
Sur les recommandations de la classe politique, des forces vives et des leaders religieux, le premier ministre Moctar Ouane prépare des modifications.
Le 1er gouvernement de transition démissionne. Moctar Ouane est reconduit à son poste par le président Bah N’Daw. Un 2ème gouvernement de transition est présenté, qui écarte des militaires de certains postes clés, sans que le vice-président Assimi Goïta en ait été averti. La réplique est immédiate.
Lundi 24 mai, nouveau coup d’état militaire, et stupéfaction générale devant l’arrestation par l’armée du président et de son 1er ministre. Nouvelle condamnation des instances internationales et de la CEDEAO, laquelle, le 30 mai, suspend le Mali de ses institutions et appelle « à la nomination immédiate d’un civil au poste de 1er ministre ». Bamako reste dans le calme, peut-être une façade de lassitude générale devant les défaillances régulières de gouvernance.
Jeudi 3 Juin, le Président de la République Française, Emmanuel Macron, suspend la coopération militaire bilatérale avec le Mali.
Lundi 7 Juin, investiture d’Assimi Goïta comme nouveau président de la transition. Dans son discours, il promet un retour au pouvoir des civils début 2022, et le respect de l’Accord de Paix d’ Alger, crucial pour le Mali.
Il nomme comme 1er ministre un dirigeant de la coalition M5-RFP, Choguel Maïga. Issu de la société civile, celui-ci est présenté comme un ministre d’ouverture.
Mercredi 9 Juin, Les chefs d’état de la CEDEAO reviennent sur leur condamnation et encouragent les nouvelles autorités.
Jeudi 10 Juin, dans sa conférence de presse, Emmanuel Macron annonce de la fin de l’opération Barkhane. Sur la présence militaire française au Sahel, le président français déclare qu’après plus de huit ans d’engagement massif, la France va réduire sa présence militaire au Sahel : un retour progressif de 50% des effectifs, la fermeture de bases, et une nouvelle articulation de la lutte anti-djihadiste autour d’une « alliance internationale ».
Dimanche 13 Juin, se tient à Bamako le 1er conseil des ministres avec la nouvelle équipe gouvernementale. Celle-ci comporte des membres du M5-RFP, des militaires, des politiques, des technocrates.
Les objectifs restent :
-L’organisation d’ « Assises nationales de la transition » qui devraient permettre une trêve globale, politique, syndicale et sociale,
-Une relecture intelligente de l’Accord d’Alger signé en 2015
-Des élections présidentielles et législatives à partir de février 2022
-Un changement de la Loi fondamentale de 1992, soumis à référendum fin octobre 2022
Il reste 8 mois à la transition pour procéder à la « Refondation du Mali ». Ce n’est pas beaucoup. Espérons.
Synthèse rédigée à partir des journaux Le Monde Afrique, Jeune Afrique, France 24, RFI, Le Point, Ouest-France et La Croix.