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17 janvier 2013 4 17 /01 /janvier /2013 14:46

Voilà un an, jour pour jour, que tout s’est déclenché au Mali.

Le 17 Janvier 2012, c’ est l’entrée en guerre du MNLA pour la « libération » de l’Azawad. La violence des événements  ressemble tout d’abord  à une nouvelle crise de la « question touareg », question sans solution depuis l’Indépendance du Mali, et malgré des alarmes répétées :

« Faut-il qu’un peuple disparaisse pour savoir qu’il existe ? » avait écrit Mano Dayak

A nouveau en janvier dernier, la réponse du MNLA, sans être celle de l’ensemble des Touareg,  passe par les armes. Contrairement à la réalité historique, le MNLA voit dans le Nord Mali un territoire qui est propre aux Touaregs. Il en a revendiqué à plusieurs reprises l’indépendance, en particulier dans les années 90. Le mouvement indépendantiste n’en est donc pas à ses premiers faits d’armes. En janvier 2012, quand il  entre en « action », le MNLA se sent  encouragé par les promesses qu’a pu lui tenir Khadafi depuis longtemps, et fortifié par l’expérience de ses mercenaires en  Lybie, et par l’armement puissant qu’ils ont rapporté après la chute du régime.

 

Un an plus tard, à ce jour, c’est la France qui est en première ligne, dans une guerre déclarée au terrorisme.  L’Azawad est devenu un territoire occupé et confisqué par de multiples groupes rebelles djihadistes. Dès le mois d’avril dernier, après des combats contre une armée malienne vite défaite, le MNLA perdait la main, rapidement évincé par la mouvance islamiste qui lui avait apporté son  concours. Belle aubaine pour s’établir et instaurer une charia radicale.

 

Depuis 10 mois, nous essayons de rendre compte régulièrement de la situation et de donner quelques clés de lecture pour comprendre la situation très complexe qui s’est progressivement installée, révélant en plein jour des réalités jusqu’alors peu connues du grand public, et peu portées par les media.  

Sauf à avoir pu entendre les préoccupations d’un certains nombre de Maliens, peu confiants en leur gouvernement et préoccupés de la corruption rampante jusque dans les hautes sphères de l’Etat, le « grand public » que nous constituons était bien loin de soupçonner un tel état des lieux. En France, nous faisions plutôt confiance à un gouvernement jugé démocratique au vu d’autres exemples africains  moins recommandables, et le Mali nous était plutôt volontiers présenté comme un modèle : une élection présidentielle devait avoir lieu au printemps (aux mêmes dates que la nôtres), avec un président qui ne se représentait pas, laissant place à l’alternance.

Mais la réalité était celle d’un régime vermoulu. Il a été renversé le 22 mars dernier, plongeant le Mali dans une double crise, sécuritaire, avec les exactions au Nord et politique, avec la chute du pouvoir.

 

Le putsch militaire ouvrait la voie pour l’entrée en jeu des forces islamistes djihadistes, installées au Sahel depuis des années déjà : celle d’AQMI, branche d’Al-Quaïda, d’origine algérienne et déjà tristement célèbre pour ses prises d’otages occidentaux : refoulée par l’Algérie qui fut la première victime de ses violences, AQMI a installé son sanctuaire probable dans la région de Kidal, au Mali. Celle du MUJAO,  le Mouvement pour l’Unicité et le Djihad en Afrique de l’Ouest, constitué de radicaux islamistes africains noirs :  cette  branche dissidente d’AQMI, s’est établie plus à l’ouest, vers la Mauritanie revendiquant elle  aussi divers enlèvements.  Enfin, la dernière, celle d’Ansar Dine, mouvement djihadiste proprement malien,  distinct du MNLA laïc et qui a fait son apparition en 2012.

Tous ces hommes connaissent fort bien le Nord Mali désertique,  dont ils sont les maîtres et où ils ont établi leurs bases, y recrutant, sans doute pour la moitié au moins, des combattants djihadistes venus d’ailleurs : lybiens, somaliens, afghans, pakistanais…et osons le dire, peut-être quelques français aussi. Leur espace d’action est  grand comme la France plus la Belgique, avec des massifs montagneux et de multiples cachettes, avec un climat très dur auquel ces combattants sont aguerris,  entre chaleur, vents de sable et rareté de l’eau. Ils sont très bien armés. Ils sont très déterminés. Ils sont mobiles comme des boules de mercure.

 

Pourquoi  la guerre a-t-elle soudain si brusquement démarré, alors que depuis des mois la priorité restait la négociation et la diplomatie ? Certes, il y avait le risque, malgré des menaces qui tardaient à entrer en application,  de laisser s’enliser la situation.

Mais en réalité, le 10 Janvier, la donne a changé tout à coup : alors que le Président de la République du Mali était sur le point d’être une nouvelle fois destitué par les militaires du capitaine Sanogo, souhaitant reprendre totalement les rênes,  les forces rebelles du Nord attaquaient le Sud, à quelques encablures de Mopti. La voie s’ouvrait ensuite aux rebelles  jusqu’à Bamako, capitale sans gouvernement, et c’était fait de prendre le pouvoir et d’instaurer la charia dans l’ensemble du Mali.

La France a répondu à l’appel en urgence lancé par le gouvernement malien, quand les premières troupes maliennes ont été défaites à Konna.

 

François Hollande l’a dit et les forces armées françaises le savent : cette guerre sera dure et elle sera longue, avec de multiples pièges et risques.  Elle se fera au sol et avec du corps à corps. Elle fera des victimes.

Elle ne pourra être menée victorieusement que si parallèlement les  institutions politiques au Mali sont rétablies dans leur crédibilité et si une véritable armée malienne se reconstruit, appuyée par la Misma- les 3300 hommes des forces militaires africaines prévus dans le dispositif validé par l’ONU.

A ce jour, la communauté internationale soutient l’engagement français, et facilite les opérations : autorisation de survol des territoires, blocage des frontières, prêt d’avions, promesses d’ apport logistique et humanitaire, collaboration au niveau du renseignement : mais sur le terrain les Français sont seuls, avec les quelques troupes africaines qui devraient commencer à arriver.

 

Cette guerre n’ira pas sans son cortège de malheurs : déplacés, réfugiés, victimes directes ou indirectes, débordements, revanches, règlements de comptes…Et tout ne saurait être maîtrisé absolument. Un hommage vient d'être rendu aux Invalides au premier soldat français tué au Mali. On peut être sûrs que les djihadistes savent ce qu’ils font : la prise de Diabali, après la défaite de Konna, c’est une façon de s’introduire dans une zone suffisamment peuplée pour y interdire des frappes aériennes et provoquer le face à face des hommes au sol. C’est sans doute ce type de guerre, une guerre « sale », que souhaitent les islamistes du Sahel aujourd’hui.

 

  Nos pensées quotidiennes vont à nos villages partenaires du Mali, et à nos amis maliens, d'ici et de là-bas, qui sont les premiers au coeur de ce déchirement.

 

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