Pour Noël, quatre titres que nous avons bien aimés
Y a pas d'embouteillage dans le désert, Moussa Ag Assarid (Presses de la Renaissance, 17,50€)
Etonné, perplexe, inquiet, offusqué, surpris, amusé, déconcerté, Moussa le Touareg, né dans le désert au nord du Mali, enfant des campements nomades, découvre les modes de vie des Français. Le regard qu'il porte sur ce que nous ne voyons plus, tant c'est devenu commun, est à la fois drôle et décapant. Il nous fait nous frotter les yeux pour mieux nous regarder nous-mêmes... La clarté de son ciel, le silence, le temps ou la pudeur lui manquent, mais le TGV, quel bonheur !
Galadio, Didier Daeninckx (Gallimard, 15,50€)
C'est un beau roman. Le texte, soutenu comme toujours chez cet auteur, par une documentation fouillée et précise, raconte la quête d'un père disparu. On est à la veille de la 2nde Guerre mondiale. L' adolescent, Ulrich, qui vit à Duisbourg avec sa mère, est sauvé de justesse de la persécution nationaliste hitlérienne : il a en effet le malheur d'être né noir, fruit d'un bref amour entre une jeune allemande et un soldat africain, faisant partie des troupes françaises d'occupation de la Ruhr, après le Traité de Versailles (1919 ). Progressivement, le récit nous conduit à Berlin, puis vers le continent africain, puis dans les environs de Mopti, où il retrouve le village familial. La dernière partie est poignante. Dévoilement d'un aspect bien méconnu de l'histoire du XXème Siècle.
ET AUSSI :
Demain j'aurai vingt ans, Alain Mabanckou, (chez Gallimard , 21€)
Ce n'est ni le petit Nicolas, ni le Momo de La vie devant soi, c'est Michel, enfant congolais de 10 ans, à Pointe-Noire, dans la fin des années 70. Sa parcelle est son refuge et le quartier, son univers. Fils unique de maman Pauline, il observe sa famille et son voisinage, il entend les nouvelles du monde, il découvre la poésie : il retient, il raisonne, il raccroche les morceaux, il dit ses préoccupations d'enfant, il s'approprie le savoir des plus grands...et il a en charge le bonheur de sa mère. On croise de belles figures dans ce monde, celle de Petit -Piment est l'une des plus attachantes. Une fin superbe.
Portrait de groupe au bord du fleuve, Emmanuel Dongala (Actes Sud, 22,80€)
Méréana a rejoint pour quelque temps les casseuses de pierre au bord du fleuve, un dur travail peu rémunérateur, mais provisoire pour elle, et qui devrait lui assurer le financement d'une reconversion professionnelle. Sans l'avoir voulu, mais parce qu'elle est la plus instruite, elle est portée à la tête du groupe de ces 15 femmes solidaires, qui se révoltent contre le bas prix payé de leurs sacs de pierres. C'est le roman de cette lutte, qui nous est raconté avec force, gravité, émotion, et drôlerie aussi. C'est surtout l'histoire secrète de chacune de ces femmes que l'on découvre au fil des pages, secrète et souvent tragique. L'auteur d'ailleurs ne nous épargne pas toujours, comme la guerre n'a pas épargné telle ou telle. Mais beaucoup de finesse, de sensibilité, de justesse, des portraits magnifiques et plusieurs scènes inoubliables. Les hommes n'ont pas le beau rôle, un seul sauve la mise !